Le peintre porte un regard empli de dynamisme, d’effervescence, de pleine jouissance dans l’éclat des matières liquides picturales grasses et suaves. Sa force d’évocation se dresse naturellement au cœur de la toile saturée, où tout semble jaillir de mille parts, éclater, exploser. Et si l’on discerne parfois des mots, des lettres ou de vagues tracés, ils font vibrer la toile d’une énergie psalmodiée. La peinture porte son rythme propre, à la fois pleine, rayonnante, lumineuse, elle est comme un concentré de nymphéas que l’enfant taquin se serait amusé à fixer longtemps en plissant les yeux. Elle est ce flou liquide, vaporeux, évanescent où l’on se noie sans savoir si nos poumons se remplissent d’air ou d’eau, sereinement comme si l’on se métamorphosait nous même dans un nouvel univers, une cosmologie de l’âme, une liquidité de tout notre être. Elle brouille non seulement l’espace puisqu’elle ne se restreint à aucun support, franchit toutes les barrières formelles, jaillit de toutes parts, mais elle anéantit aussi toute durée, confond matières nobles et futiles essences, faisant naître l’illusion d’une longévité. Si vous tendez l’oreille, vous sentirez vibrer la toile au rythme du pinceau, vous percevrez le rire joyeux du rond blanc obsédant, fascinant, libre et léger.
Fabienne Neau-Papineau, juin 2009